Publié le 21 avril 2023 Mis à jour le 21 avril 2023

Certificat Ecotopia, diplôme européen, financement : comment CY s’implique dans l’alliance Eutopia

Interview à Luciana Radut-Gaghi

« Nous souhaitons qu’il y ait un soutien plus massif aux alliances et à leurs initiatives de la part des pays membres de l’UE, et pas seulement de la France. En tant que porteurs d’universités européennes, nous avons un rôle important à jouer auprès de nos ministres et nos gouvernements pour leur dire à quel point l’enjeu de la création d’un espace européen de l’enseignement supérieur et de la recherche est grand. »


C’est ce qu’indique Luciana Radut-Gaghi, VP relations internationales et partenariats stratégiques de CY Paris Cergy Université, à News Tank le 19/04/2023.

Dans le cadre de l’alliance européenne Eutopia, dont CY est membre, cette ambition se traduit notamment avec la création de l’initiative Ecotopia, « réseau de licences en économie, dont les maquettes sont coordonnées entre six des dix établissements de l’alliance. L’Université de Stellenbosch en Afrique du Sud, partenaire global d’Eutopia, en est partenaire de mobilités ».

À CY, « le programme a démarré en septembre 2022 ; pour d’autres, c’était en janvier 2023, en fonction des contraintes », précise-t-elle.

Ainsi, « la première promotion obtiendra un certificat Eutopia et nous espérons que cela évoluera vers un diplôme européen. À terme, nous souhaitons créer un master sous la forme d’un diplôme conjoint, que l’on espère reconnu comme diplôme européen également dans les années à venir. Celui-ci sera encore plus orienté économie et transitions, qui est un sujet incontournable aujourd’hui. »

Dans cet entretien, Luciana Radut-Gaghi revient également sur l’AAP de la Commission européenne autour du label “diplôme européen”, dont Eutopia est lauréat par le biais d’un consortium d’alliances avec le projet EdLab.

« Chacun se positionne sur les projets qui sont prioritaires pour son institution »

Pouvez-vous revenir sur la constitution d’Eutopia et sa composition actuelle ?

En septembre 2017, Emmanuel Macron prononçait son discours de la Sorbonne, en avançant notamment l’idée de connecter les universités en Europe et de créer un espace de coopération pour qu’elles soient plus visibles et plus fortes.

En 2019, 17 alliances européennes, dont Eutopia, sont lauréates de la première vague de l’appel à projets publié par la Commission européenne. En 2022, 16 ont été renouvelées. Au total, avec les projets de la deuxième vague de 2020, il y a 44 alliances européennes à ce jour. L’objectif pour la Commission est d’arriver à 60 d’ici une ou deux années.

L’alliance Eutopia réunissait six universités en 2019 et était coordonnée par l’Université de Ljubljana en Slovénie. Parmi ces six établissements du projet pilote figurait l’Université de Warwick au Royaume-Uni, qui, malgré le Brexit, continue d’en être membre. En 2021, nous avons eu envie d’élargir l’alliance en accueillant quatre nouveaux établissements : 

  • l’Université de Babeș-Bolyai en Roumanie ;
  • l’Université Ca’ Foscari de Venise en Italie ,
  •  la Technische Universität Dresden en Allemagne
  • et l’Université Nova Lisboa au Portugal.
L’université Pompeu Fabra à Barcelone est devenue coordinatrice en 2022.

L’élargissement de l’alliance Eutopia a-t-il eu un impact sur son fonctionnement ?

Nous nous sommes rapidement rendu compte qu’à dix il était plus facile de fonctionner qu’à six ! À six, chacun sent comme un devoir de participer à toutes les initiatives, or à dix, nous savons que cela n’est pas possible. Ainsi, chacun se positionne sur les projets qui sont prioritaires pour son institution, en fonction de ses domaines d’expertises. On apprend les uns des autres et nous devenons complémentaires.

C’est dans cette logique que nous avons bâti le second projet matrice, qui correspond à la phase de consolidation de l’alliance (Eutopia More). Chaque université s’est donc positionnée sur la coordination d’actions dans lesquelles elle est motrice. Entre 2019 et 2022, Eutopia a obtenu une série de projets financés, et notamment :

  • Un Cofund Marie Skłodowska-Curie pour des post-doctorants, coordonné par CY (76 contrats sur cinq ans) ;
  • un projet Erasmus pour développer un schéma commun de formation continue, FLECSLAB ;
  • 2M€ supplémentaires dans le cadre d’Horizon Europe pour renforcer la recherche (chaque alliance en a bénéficié).

Chacune des alliances cherche à développer sa propre identité. Une des particularités d’Eutopia ce sont les partenariats globaux : c’est-à-dire des universités extra-européennes avec lesquelles nous souhaitons développer des programmes de formation, de recherche et des initiatives communes, avec lesquelles nous nous engageons dans des actions de diplomatie scientifique. 

Au sein de l’alliance Eutopia, comment se positionne CY ?

Au fur et à mesure de l’avancée des projets Eutopia, les positions de chacun se cristallisent. CY coordonne le Cofund Marie Skłodowska-Curie. Dans le projet Eutopia More, nous co-coordonnons le travail sur la constitution et l’incubation de communautés connectées, avec des initiatives bottom-up qui se donnent trois ans pour devenir autonomes.

Ces communautés participent du futur Eutopia College qui réunira l’offre conjointe, dont Ecotopia, et du Eutopia Global Institute, qui réunira les collaborations dans le domaine de la recherche. Dans ce cadre, nous coordonnons la Young Leaders Academy, dont le rôle est d’accompagner des chercheurs en début de carrière au leadership académique, tout en les rendant ambassadeurs de leurs institutions et de l’alliance.

Enfin, à CY se trouve la Impact and Dissemination Unit d’Eutopia, qui gère tout le travail de communication et de valorisation de l’alliance, d’analyse de l’impact à l’échelle locale, européenne et globale, et de diplomatie scientifique.

« L’ambition est grande et nous nous donnons les moyens pour y parvenir »

Comment est née l’initiative Ecotopia ?

En janvier 2020, Mathieu Martin, directeur de l’institut éco-gestion de CY Tech, nous a indiqué son envie de collaborer avec les collègues d’Eutopia autour du DU Economics and Corporate English, enseigné en anglais, qui existait déjà à CY. Pendant trois ans, avec Charlotte Simunek, ils ont bâti avec nos partenaires un réseau de licences en économie, dont les maquettes sont coordonnées entre six établissements de l’alliance. L’Université de Stellenbosch en Afrique du Sud, partenaire global de Eutopia, en est partenaire de mobilités.

À CY, le programme a démarré en septembre 2022 ; pour d’autres, c’était en janvier 2023, en fonction des contraintes. Cela représente 45 étudiants cette année, qui feront tous des mobilités à partir de septembre. Chaque université reste souveraine en matière de sélection des étudiants.

Quel est le principe de ce projet ?

Le principe est que les étudiants suivent un cursus en économie, gestion et affaires dans leurs langues respectives, ainsi que des conférences et projets communs en anglais :

  • La première année, ils ont notamment trois plénières en ligne, mais aussi des projets étudiants au cours desquels ils doivent collaborer. Il y a aussi une école d’été obligatoire en Slovénie afin de réunir tous les étudiants en présentiel.
  • La deuxième année, les étudiants partent en mobilité dans l’un des établissements participants, y compris Stellenbosch. Ces mobilités “circulaires” entre les membres du programme sont le résultat d’une négociation détaillée entre les parties.
  • La dernière année, les étudiants rentrent dans leur établissement d’origine, et continuent d’avoir des conférences et projets communs. À la fin du programme, on leur propose une école d’été optionnelle à Rabat sur le campus de l’Essec Business School, sur le thème de l’innovation et de l’entrepreneuriat en Afrique.

La première promotion obtiendra un certificat Eutopia et nous espérons que cela évoluera vers un diplôme européen. À terme, nous souhaitons créer un master sous la forme d’un diplôme conjoint, que l’on espère reconnu comme diplôme européen également dans les années à venir. Celui-ci sera encore plus orienté économie et transitions, qui est un sujet incontournable aujourd’hui.

L’ambition est grande et nous nous donnons les moyens pour y parvenir. Nous souhaitons qu’il y ait un soutien plus massif aux alliances et à leurs initiatives de la part des pays membres de l’UE, et pas seulement de la France. En tant que porteurs d’universités européennes, nous avons un rôle important à jouer auprès de nos ministres et nos gouvernements pour leur dire à quel point l’enjeu de la création d’un espace européen de l’enseignement supérieur et de la recherche est grand.

Eutopia fait également partie des lauréats de l’appel à projets de la Commission européenne autour du label « diplôme européen ». Quels sont les objectifs fixés et qu’en attendez-vous ?

Dans le cadre de cet AAP, peu de places étaient proposées. Nous avons décidé de nous associer à d’autres alliances pour ne pas manquer cette opportunité de faire partie des projets pilotes du « label diplôme européen ».

EdLab est ainsi porté par un consortium d’alliances représentées par les universités des pays du « Sud » de l’Europe : Eutopia, Arqus, Sea-UE et Enlight.

Nous avons trois objectifs :

  • Tester les 14 critères de l’AAP sur les initiatives de type Ecotopia dans l’ensemble du consortium EdLab ;
  • Valider la traduction des critères en indicateurs de qualité et d’assurance qualité dans les formations conjointes en Europe. Ce travail participe à un autre plus ample - l'évaluation des alliances européennes, des « ovnis » dans le paysage de l’ESR ;
  • Tester l’idée, le concept, le dispositif de diplôme européen auprès des partenaires globaux d’Eutopia, mais pas uniquement. L’objectif est de comprendre si le diplôme européen peut rendre plus visibles l’Europe et les alliances européennes, s’il pouvait agir comme facteur d’attractivité.

Le diplôme européen, les entités légales pour des alliances européennes, ce sont certes des avancées de la coordination européenne en matière d’enseignement supérieur. Si des instruments pour la coopération de la recherche existent, aucun ne couvre aujourd’hui l’ensemble des fonctions que se donnent les Universités européennes comme Eutopia : formation, recherche, innovation, service à la société.

Il y a un travail à mener. Nous, universités françaises, nous y participons de notre mieux, en renforçant le dialogue au niveau national. Nous encourageons aussi l’ensemble des universités membres de faire pareil dans leurs pays. Enfin, chose peu commune jusqu’à il y a quelques années, nous participons de manière directe à des travaux coordonnés par la Commission européenne.

Original interview published by NewsTank