Profil atypique, Cécile Jouanne a mené sa thèse sur le développement d’un nouveau matériau hybride et polyvalent d’électrodes dans deux laboratoires de pays différents. La première doctorante de CY Cergy Paris Université à travailler en cotutelle avec l’université du Cap, en Afrique du Sud, témoigne de cette expérience aussi dépaysante qu’enrichissante.
Le début de son parcours scientifique remonte à une dizaine d’années. Après une licence de chimie à l’université de Paris Diderot, Cécile Jouanne a ensuite fait une année de master en chimie, nanosciences et énergie de 2017 à 2018 avant de rejoindre l’école d’ingénieur Denis Diderot (EIDD) dans la filière matériaux et nanotechnologies de 2018 à 2020. ''Au cours de ces années universitaires, j’ai notamment eu l’occasion de réaliser plusieurs stages en laboratoire, à l’université ou en entreprise, en France comme à l’étranger, en Espagne. Grâce à ce cursus et à ces différentes expériences, j’ai vraiment développé une passion pour la recherche et le travail en laboratoire, ce qui m’a naturellement amenée à rechercher un projet de doctorat'', témoigne Cécile Jouanne qui a ainsi commencé sa thèse en novembre 2021 en cotutelle avec CY Cergy Paris Université et l’université du Cap en Afrique du Sud.
Avec ce projet, elle a pu profiter du savoir et de l’expertise de deux laboratoires : le LPPI - Laboratoire de Physicochimie des Polymères et des Interfaces (CY Cergy Paris Université) - qui mène notamment plusieurs projets autour du stockage de l’énergie (batteries, supercondensateurs, photovoltaïque) - et le SensorLab (université du Cap), spécialisé dans la recherche et le développement autour des capteurs de molécules biologiques ou polluantes. ''Mon projet de thèse portait sur le développement d’un nouveau matériau d’électrodes pour deux applications distinctes : le stockage de l’énergie dans les supercondensateurs développé au LPPI, et les capteurs de molécules polluantes notamment au SensorLab'', explique-t-elle. ''J’ai avant tout choisi ce projet de thèse pour le sujet : un projet transverse et complet sur la synthèse et la fonctionnalisation de matériau pour le stockage de l’énergie''.
Pérenniser la collaboration scientifique internationale
Cette thèse étant la première sur le sujet, il reste encore du travail et les possibilités de recherche sont encore nombreuses ce qui peut laisser présager de nouvelles collaborations entre le LPPI et le SensorLab. ''L’avantage de travailler en collaboration avec l’université du Cap est que cela a apporté une nouvelle composante au projet scientifique en intégrant la thématique des capteurs sur laquelle je n’avais jamais travaillé, ce qui m’a permis d’ajouter une corde à mon arc tout en bénéficiant de l’expertise des chercheurs du SensorLab''. C’était aussi l’occasion unique d’aller en Afrique du Sud et d’étudier à l’étranger pour Cécile Jouanne qui a vu ce partenariat comme une opportunité de progresser, d’évoluer en sortant de sa zone de confort. L’occasion rêvée de découvrir un nouveau pays et une nouvelle culture. ''Aujourd’hui, j’en tire une bonne expérience, une nouvelle vision sur un pays et une culture que je ne connaissais pas et de nouvelles relations internationales, professionnelles comme amicales'', confie la doctorante qui a commencé ses travaux de recherche au LPPI en novembre 2021 pour développer dans un premier temps le matériau d’intérêt et le tester pour le stockage de l’énergie. Cécile Jouanne a ensuite pu rejoindre le SensorLab de septembre 2023 à mai 2024 où elle a continué à développer ce matériau en le modifiant pour qu’il soit applicable dans le domaine des capteurs. ''Faire une thèse en cotutelle, c’est collaborer avec des chercheurs aux spécialités différentes, avoir accès à des structures et des équipements qui ne sont pas forcément présents dans tous les laboratoires et apprendre d’autres choses que la science comme toutes les procédures administratives, obtention d’un VISA par exemple, ce qui est très enrichissant aussi bien sur le plan personnel que professionnel'', souligne-t-elle.
Immersion culturelle et scientifique
La doctorante a dû faire preuve d’adaptabilité pour s’acclimater aux différents modes de fonctionnement. L’expérience de travail à l’université du Cap diffère de celle au LPPI. En effet, le doctorant menant une thèse en France a le double statut étudiant-salarié étant inscrit à l’université mais étant aussi contractuel de la fonction publique. Le travail au laboratoire est donc régi par un contrat de travail avec notamment un salaire, un volume horaire, des droits et des devoirs. Les doctorants viennent travailler au laboratoire du lundi au vendredi avec des horaires d’ouverture fixes. ''En Afrique du Sud, le fonctionnement est un peu différent car les doctorants n’ont que le statut d’étudiant et ne reçoivent pas de salaire. Ils postulent à des bourses d’études qui leur permettent à la fois de financer leur recherche et leur vie de tous les jours'', indique Cécile Jouanne qui, étant principalement basée à CY Cergy Paris Université, a bénéficié du régime du doctorat à la française. ''Le rythme et l’organisation d’une journée de travail en Afrique du Sud est aussi plus libre puisqu’ils ne sont pas conditionnés par un contrat et que le laboratoire est ouvert sur une plage horaire plus étendue et, surtout, tous les jours de la semaine. Là-bas, les étudiants sont donc libres d’organiser leur emploi du temps comme ils le veulent en accord avec leurs encadrants et tant qu’ils maintiennent une production scientifique suffisante.'' Cécile Jouanne a préféré quant à elle conserver le rythme avec des semaines de 5 jours et des horaires réguliers pour ne pas perdre le rythme avant de finir sa thèse en France et pour garder un emploi du temps aligné à celui de ses encadrants français.
Expérience professionnelle unique
Peu importe la destination, faire une thèse à l’étranger est une excellente opportunité, voire même un incontournable pour certaines entreprises ou certains laboratoires selon elle. ''Faire une cotutelle entre une université française et un autre établissement permet d’avoir cette expérience à l’international tout en gardant un pied dans le système français ce qui peut rassurer les plus frileux. Au-delà de cette expérience valorisable sur un CV, c’est également l’occasion d’élargir son réseau en rencontrant des personnes d’horizons différents, d’apprendre et de profiter de l’expertise d’autres chercheurs et de perfectionner sa communication en anglais et son adaptabilité à différents milieux. Mais travailler à l’étranger, c’est surtout l’occasion de voyager, de découvrir un nouveau pays, une nouvelle culture, une nouvelle façon de vivre et de travailler''.
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